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Mondialisation, langues et politiques linguistiques

13 juin 2014

Langues et panafricanisme : analyse du volêt linguistique dans la construction de l'Union Africaine

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Dr. Martin Momha

Professeur de sociolinguistique et de didactique

Chercheur en sciences du langage et de la communication

Université de Moncton

 

Le panafricanisme est un mouvement social, politique et culturel qui vise « à unifier les africains du continent et de la Diaspora africaine en une communauté africaine globale… Son objectif ultime est la réalisation d'une organisation politique intégrée de toutes les nations et peuples d'Afrique ». Le panafricanisme transcende les barrières raciales et s’incarne dans un vaste projet politique qui s’exprime aujourd’hui dans une large organisation : l’Union Africaine, née en 2002 à Durban des cendres de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA). L’acte constitutif de l’U.A. a été parafé par les chefs d’états membres de l’OUA dans quatre langues: l'arabe, l'anglais, le français et le portugais.

Cependant, si le panafricanisme est une révolution qui vise la solidarité, l’intégration et  l’émancipation des peuples africains, ce mouvement devrait légitimement fonder ses principes sur la promotion des valeurs authentiquement africaines. Or, il se trouve que la constitution de cette organisation qui se veut afrocentrée, est écrite dans quatre langues non africaines. Les intellectuels africains et les pères fondateurs de l’U.A. ont-ils oublié l’importance de la langue dans la construction de l’identité africaine ? Cette indélicatesse compromettante est une aberration qui soulève quelques questions de fond : quand les chefs d’états africains se rassemblent lors des sommets de l’Union Africaine, en quelles langues dialoguent-ils ? Comment peut-on défendre une idéologie panafricaniste en faisant usage des langues coloniales ?

En tenant compte des configurations sous régionales et des spécificités ethnolinguistiques de l’Afrique, le but de cet article est de définir et d’intégrer dans le projet de construction de l’Unité Africaine des langues transfrontalières véhiculaires susceptibles d’être érigées en langues officielles de l’Union Africaine.

 

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 Avant les africains, les américains et les européens pour ne citer que ces deux peuples, se sont lancés dans des aventures    fédéralistes et unitaires.  Les premiers ont choisi l’unilinguisme et les seconds le multilinguisme.  Quel modèle correspondrait à l’Union Africaine ?

 

1 - Le modèle américain : l’unilinguisme

Dès leur indépendance le 04 juillet 1776, les Etats Unis d’Amérique n’ont pas perdu du temps dans des cénacles et des hémicycles pour légiférer sur une langue qui reflète leur identité souveraine. Ces ex-colonies britanniques devenues indépendantes, ont adopté naturellement la langue coloniale dominante comme langue officielle, préférant ainsi par leur choix ombilical la civilisation anglo-saxonne au détriment de la civilisation amérindienne.

En effet, l’hypothèse de la construction d’une nation sur la base d’une langue autochtone n’est  pas valable dans le cas américain, puisque l’anglais n’est pas la langue originelle de l’Amérique. L’histoire nous révèle que les premiers occupants du continent américain étaient des indiens. Ces peuples parlaient des langues dites « amérindiennes ». Mais les politiques impérialistes et assimilationnistes régentées par la monarchie britannique et des empires coloniaux n’ont accordé qu’un statut folklorique aux langues indigènes des Amériques, exterminant les unes et renvoyant les autres au rang de comparses. Aujourd’hui, l’identité américaine est inséparable de la langue anglaise. Voilà pourquoi dans les milieux fondamentalistes outre-Atlantique, on pense que « ne pas parler l’anglais est un acte antipatriotique ».

Dans la logique américaine, une nation est une construction soudée et homogène et non un patchwork linguistique ou une « tour de Babel ». A chaque peuple souverain, doit correspondre une langue et une nation, d’où le slogan «One Language, One Nation». En prenant appui sur l’histoire du Canada, les américains sont convaincus que « la diversité des langues conduit forcément au conflit linguistique, à la haine ethnique et au séparatisme politique «à la Québec». La seule façon de défendre leur  unité et leur identité, c’est d’angliciser les autochtones et les immigrants, bref, « d’imposer l'assimilation comme unique mode d'intégration ».  A ce titre, Franklin Roosevelt, Président des Etats Unis de 1932-1945 déclarait : « Il n’y a de place ici que pour une seule langue, et c’est la langue anglaise, parce que nous entendons voir le creuset transformer la population en Américains, de nationalité américaine, et non en pensionnaires d’une auberge polyglotte ».

La politique linguistique américaine est un protectionnisme qui garantit la prépondérance et le monopole de la langue anglaise dans l’administration et la quasi-totalité des secteurs d’activité. Elle tire son essence du monolinguisme dont le faisceau unimorphisateur confère aux peuples d’une même nation la même identité. Parler une même langue, c’est non seulement affirmer et manifester son appartenance à la même communauté linguistique, mais aussi et surtout partager les mêmes valeurs, voire la même vision du monde.  C’est cet idéal qui sous-tend « l’american way of live »

 

2- Le modèle européen : le multilinguisme

Si les états américains ont fondé leur politique linguistique sur le monolinguisme en focalisant leur vision du monde sur « la pensée unique », les européens, eux,  ont érigé la leur sur le multilinguisme fonctionnel égalitariste. En effet, l’Union Européenne est une mosaïque architecture, un patchwork de 24 langues officielles : Allemand, Anglais, Bulgare, Croate, Danois, Estonien, Grec, Espagnol, Français, Irlandais, Italien, Letton, Lituanien, Hongrois, Maltais, Néerlandais, Polonais, Portugais, Roumain, Slovaque, Slovène, Finlandais, Suédois et Tchèque. Sur ces 24 langues officielles, trois jouissent d’un statut de langue de travail : Allemand, Anglais et Français. Cette multiplicité de langues officielles pose quelques problèmes pratiques : a/ tous les actes administratifs, tous les textes de lois, toutes les couvertures médiatiques des évènements et des faits d’actualité par des chaînes européennes (euronews/eurosports, etc.) sont traduits en 24 langues et diffusés sur 24 canaux. Un tel dispositif implique une grande mobilisation de ressources humaines et un coût financier énorme. b/ le citoyen européen authentique serait malgré lui un avatar ou archétype polyglotte qui s’exprime obligatoirement en 24 langues. Une vraie gageure.

Fondé sur le culte de la diversité et de la pluralité culturelle, le multilinguisme à l’échelle européenne transforme l’union en une agglutination de molécules hétéroclites. En effet, loin d’être un vecteur fédérateur, la pluralité des identités linguistiques qui interfèrent au sein de l’union contribuent plutôt à enfermer les peuples dans des cocons infra-nationalistes. L’identité européenne est donc un leurre, car au sein de l’union, les français resteront français et les espagnols demeureront espagnols. Ainsi, la quête d’une citoyenneté européenne et l’expression d’un patriotisme européen sont des projections asymptotiques qu’aucun compromis ne rendrait accessible.

 

3- Le modèle africain : le monolinguisme régional

À travers l’Académie des Langues Africaines dont la mission est la valorisation du patrimoine linguistique africain, l’Union Africaine a axé sa politique linguistique sur la promotion de la diversité et de la pluralité des langues du continent. Cependant, cette politique accorde une place de choix aux langues coloniales qui ont le statut langues de travail. L’organisation panafricaine serait donc à la recherche de langues officielles. Deux théories se confrontent sur ce postulat. La première théorie, colonialiste, voudrait que les langues coloniales soient définitivement érigées en langues officielles de l’Union Africaine, ceci permet d’éviter entre des états et des peuples des heurts et les susceptibilités. La deuxième théorie, afrocentriste, prône l’affranchissement total de l’Afrique du joug colonial par la sublimation et la standardisation des langues africaines.  Comme tous les panafricanistes, je fais partie des fervents défenseurs de la deuxième hypothèse. Cependant, une question de procédure mérite encore d’être élucidée : Sur quels critères doit-on spéculer pour le choix des langues officielles de l’Union Africaine ?

Pour qu’une langue soit choisie comme langue officielle de l’Union Africaine, il faudrait qu’elle remplisse les conditions suivantes : a/ ne pas être une langue coloniale ; b/ ne pas être une langue liturgique ; c/ être une langue transfrontalière véhiculaire ; d/ être parlée  au moins dans trois pays au sein d’une sous-région. Ces critères permettent de balkaniser l’Afrique en cinq sous régions et dans chaque sous-région, correspond une langue transfrontalière véhiculaire qui répond aux critères précédemment définis :

a/ Afrique du Nord : le berbère, langue parlée au Maroc et plus précisément dans le moyen atlas, en Algérie du nord dans la région de Kabyles, en Tunisie, en Lybie et chez les Touaregs du Sahara et en Mauritanie.

b/ Afrique de l’Est : Le swahili, langue véhiculaire parlée  principalement en Ouganda, au Kenya, en Tanzanie, à l'île de Zanzibar et aux Comores, sans oublier le Rwanda et le Burundi, le Congo,  la Somalie, la Zambie et l'Afrique du Sud. 

c/ Afrique de l’Ouest : Le haoussa, langue tchadique principalement parlée au Nigeria, au Niger,  au Ghana, en Côte d’ Ivoire, au Cameroun, au Tchad et au Soudan, Il est aussi parlé dans de nombreuses grandes villes commerciales (Dakar, Abidjan, Lomé, Cotonou, Ouagadougou, Bamako, Conakry, Bangui, etc.). Aujourd’hui, le haoussa est considéré comme une langue véhiculaire (commerciale) d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.

d/ Afrique centrale : Le beti , continuum linguistique de langues bantoues parlées dans la partie sud du Cameroun, au Congo-Brazzaville, au Gabon, en Guinée équatoriale et à Sao Tomé-et-Principe. Les langues beti sont : bebele, bebil, bulu, eton, ewondo, fang, mengisa.

e/ Afrique australe : Le zoulou,  langue la plus parlée en Afrique du Sud et dans toute la cuvette de l’Afrique australe.

 

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Le continent africain compte environ  2000 langues. C’est un patrimoine riche, dense et diversifié qui mérite une politique de sauvegarde.  Cependant, sur le plan panafricain, il serait fastidieux voire impossible de vouloir promouvoir cette pluralité et cette diversité linguistique face à l’archidomination des langues coloniales. Pour plus de pragmatisme, l’Union Africaine devrait décentraliser ses prérogatives en accordant aux états membres des missions de promotion des langues nationales pour se consacrer intensément à la valorisation des langues transfrontalières véhiculaires au sein des sous-régions, dans le but d’en faire constitutionnellement à moyen terme des langues officielles de l’Union Africaine. Le monolinguisme régional africain tel que je l’envisage, serait calqué sur le modèle de la confédération helvétique. Chaque sous-région africaine développera une langue officielle et les cinq langues sous régionales deviendront les langues officielles de l’Union Africaine.

 

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19 mai 2014

Quelle langue pour le Cameroun émergent à l'horizon 2035 ?

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Étude réalisée par

Dr. Martin Momha

Professeur de sociolinguistique et de didactique

Chercheur en sciences du langage et de la communication

Université de Moncton

 

1/ 2035 : une année de grâce

L’AN 2035 représente dans l’imaginaire collectif du peuple camerounais une date fatidique, un âge de grâce, une saison vernale... C’est une année spéculative qui, dans la dynamique du « renouveau », pourrait se concrétiser par l’intégration du Cameroun dans le paradigme des nations développées et respectées, après une longue période d’inertie ou d’immersion constatée depuis l’aube des indépendances. Avec l’échec retentissant de la politique de « Rigueur et de moralisation » dont l’objectif primordial était l’assainissement des mentalités, le développement communautaire et la bonne gouvernance dans un pays pauvre et endetté gangrené par la corruption et le détournement des deniers publics, il a fallu au gouvernement imaginer une nouvelle constellation, un nouveau slogan messianique susceptible de galvaniser le peuple camerounais devenu apathique, mécréant et démotivé.

2/ Un printemps chimérique ou un plan stratégique ?

« L’an 2035 » est une borne temporelle, un pôle de référence, une porte d’entrée d’une nouvelle ère. C’est une vision proleptique d’un pays en quête de prospérité. Ce vœu onirique est une projection fictionnelle que certains analystes de Gauche assimilent avant sa mise en orbite à un « bon icarien dans le néant » ou  à une « hallucination collective », s’il faut reprendre l’expression d’Orientation Hebdo dans son numéro 467 en ligne.  Associé au concept d’« émergence » dont le référent philosophique est la renaissance, l’an 2035 ressemble à un printemps chimérique qui s’inscrit dans la continuité d’un aphorisme  politique pompeusement ressassé au Cameroun par les médias dans les années 90 : « santé pour tous à l’an 2000 ». Quand on interroge les intellectuels camerounais de Droite sur la manière dont ils appréhendent le concept d’« émergence » tel qu’il est manufacturé au Cameroun, leurs interprétations convergent vers un pôle unique : « l’émergence 2035 » est un testament, une doctrine singulière incarnée et mise en scène par l’homme « des grandes ambitions ». C’est un plan stratégique de développement  à moyen terme qui repose sur quatre piliers fondamentaux : la réduction de la pauvreté, l’industrialisation du pays, la consolidation du processus démocratique, la préservation de l’unité nationale dans la diversité.

3/ Un letimotiv banal et vulgaire

Dans le Cameroun profond, « l’émergence» est un concept folklorique qu’on transpose avec plus ou moins de vulgarité et de fantaisie dans tous les domaines d’activités. Il est devenu une formule consacrée, un ingrédient qu’on retrouve dans toutes les sauces : le collège gouvernemental, les mouvements des jeunes, l’élite intellectuelle locale, les hommes d’affaires, les syndicalistes, les membres du clergé et les leaders d’opinion le mettent incessamment au centre de leurs problématiques à travers des séminaires et des conférences qu’ils organisent.  Au parlement, dans des cénacles et sur des réseaux sociaux, les débats en rapport avec la philosophie de « l’émergence » portent sur des questions politiques, économiques, sociologiques, institutionnelles, environnementales, spirituelles, morales, sportives, culturelles, etc. Quelquefois, captivés par des dossiers à grandes sensations, les groupes de discussions officieuses et officielles laissent aux oubliettes certains sujets qui pourtant, en tant que « leviers de souveraineté », relèvent d’une importance capitale.

4/ Problématique

Les populations du Cameroun se servent dans leurs communications intertribales des langues importées, héritées de la colonisation. Et pourtant, notre atlas linguistique compte plus de 210 idiomes inventoriés. En 2035 allons-nous continuer de sublimer le français et l’anglais ou devrions-nous résilier le bail linguistique qui nous lie à nos anciens colonisateurs et engager un processus de nationalisation de certaines de nos langues vernaculaires ? S’il fallait choisir une langue nationale dans la pluralité et la diversité des éléments constitutifs de notre parc linguistique,  sur quel idiome les camerounais jetteraient-ils leurs dévolus sans courir le risque de discriminer les autres ou de créer une tension interethnique ?

5/ Commanditaire de l’étude

Le Mouvement Citoyen Cameroun est un regroupement d’intellectuels locaux et diasporiques qui militent pour un Cameroun original ou authentique. L’objectif de cette association apolitique est la préservation de l’identité et la promotion des valeurs camerounaises dans un monde qui se globalise.  Cette jeune association qui compte deux milliers d’adhérents dispersés sur les quatre coins du  monde, anime des forums de discussions patriotiques sur des  réseaux sociaux. En sa qualité d’observatoire des valeurs camerouno-centrées, le Mouvement Citoyen Camerounais s’est penché sur la question de la langue nationale en tant que « marqueur identitaire » du peuple camerounais et m’a octroyé un mandat de recherche pour réaliser en son nom un référendum. Dans la présente étude, je vous livre les résultats du sondage que j’ai réalisé en 2013 auprès de 1000 étudiants des facultés des arts, des lettres et des sciences humaines de quatre universités d’état au Cameroun : « quelle langue pour le Cameroun émergent à l’horizon 2035 » ?

6/ Les forces en présence

En dehors du français et de l’anglais qui sont des langues coloniales importées et imposées et qui jouissent du statut de langues officielles, on peut classer les peuples et les langues indigènes du Cameroun en quatre groupements ethno-linguistiques : a/Les langues du grand-nord, parlées dans trois régions septentrionales (Adamaoua, Nord, Extrême Nord). Les variantes dominantes sont le peulh et l’haoussa. b/Les langues du Grand Sud, parlées dans les régions du Sud, du Centre et de l’Est. La variante dominante est le Bulu. c/Les langues de l’Ouest dont les locuteurs dominants sont les bamilékés. d/Les langues de la Côte où l’on retrouve au centre le Sawa et ses variantes dialectales. L’interaction entre les peuples du Cameroun et la cohabitation entre les langues coloniales et les langues vernaculaires, ont pu donner naissance à trois langues mixtes, trois langues véhiculaires ou trois langues de grandes communication : le Fufuldé, parlé au Nord du Cameroun, le Pidgin-english  parlé à l’Ouest et le Camfranglais parlé dans des centres urbains.

7/ Facteurs de la disparition programmée des langues du Cameroun

Bien que riche, le paysage linguistique du Cameroun est un univers immensément fragile et précaire, car sur les 210 langues qui le composent, si rien n’est fait dans le sens de la préservation ou de la sauvegarde, d’ici deux générations, 207 langues locales pourraient disparaitre définitivement et ne survivront à cette calamité ou à cette catastrophe que les trois langues véhiculaires que j’ai mentionnées précédemment. Les langues indigènes du Cameroun seraient donc des « espèces linguistiques » menacées ou en voie de disparition. Cette extermination programmée est due au taux surélevé des mariages interethniques et en la transformation statutaire du français ou de l’anglais en langues maternelles dans la cellule familiale au détriment des langues vernaculaires. En effet, quand un camerounais de la Région Centre qui parle l’Ewondo épouse une camerounaise de la Région du Littoral qui parle le Duala, fatalement, leur progéniture est condamnée à ne parler que le français ou l’anglais. L’ironie est tellement si fragrante lorsque deux ressortissants camerounais n’appartenant pas à la même tribu se retrouvent hors du territoire national. C’est en français ou anglais qu’ils doivent tenir leur conversation, comme si  la francophonie ou le l’anglophonie étaient contradictoirement des leviers institutionnels qui déterminaient leur camerounité.

8/ Zoum sur la politique linguistique du Cameroun

La constitution du Cameroun de 1996 dans son article 1er, alinéa 3 stipule que : « La République du Cameroun adopte l'anglais et le français comme langues officielles d'égale valeur. Ce sont ces deux langues en exclusivité que l’on  utilise dans l’éducation, l’administration, le journal officiel, etc. Cependant, si la promotion du bilinguisme français/anglais relève de la compétence directe de l’état, la promotion et la protection des langues nationales est une compétence décentralisée qui a été transférée aux communes dans l’article 24 de la loi n° 2004/019 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux régions.Les communes sont donc chargée de : «   - la maîtrise fonctionnelle des langues nationales et la mise au point de la carte linguistique régionale ; - la participation à la promotion de l'édition en langues nationales ;  - la promotion de la presse parlée et écrite en langues nationales ; - la mise en place d'infrastructures et d'équipements ». Etant donné que la décentralisation n’est pas encore opérationnelle au Cameroun, les missions dévolues aux communes restent lettres mortes. On pourrait donc dire qu’aucun statut particulier n’est accordé aux langues dites vernaculaires devenues parasitaires, exclues du plan national d’aménagement ou de planification linguistique.  Cette dangereuse omission longtemps décriée par des intellectuels a poussé le gouvernement de la république à prendre deux initiatives pour le développement et la préservation des langues indigènes. La première consiste en la promotion des radios communautaires et la subvention des émissions en langues locales dans les médias du service public. La deuxième intègre dans le programme scolaire l’apprentissage d’une langue régionale. Les élèves inscrits dans les écoles publiques de la Province du Centre apprennent l’Ewondo et ceux de la région du littoral apprennent le Duala. Non seulement cette mesure est inefficace mais aussi arbitraire, car elle contraint les élèves allogènes à apprendre la langue des autochtones au détriment de leur langue maternelle.

9/ La langue nationale, une question de souveraineté

Au lendemain de son indépendance, le Cameroun a choisi le français et l’anglais pour administrer ses citoyens. Ce choix était justifiable à cette époque où ce jeune état souverain était fragilisé par des conflits politiques et des guerres fratricides entre ses tribus.  La langue coloniale avait pour rôle d’unifier politiquement notre état multilingue et multiethnique. Un demi-siècle après les indépendances, les langues coloniales continuent davantage de cimenter les fractures et de servir de trait d’union entre les ethnies. Cependant, le choix provisoire et circonstanciel d’hier pourrait se transformer demain en choix définitif, car certains analystes pensent que « les langues coloniales ont de plus fortes chances de se maintenir longtemps comme langues officielles au Cameroun du fait qu'elles sont étrangères et évitent ainsi les problèmes de préséance entre les langues locales ou nationales...cette situation ne peut pas avoir comme résultat de promouvoir la langue nationale, car elle affermit au contraire la langue coloniale ».Dans une communication que j’ai présentée au 37 colloque des linguistes des provinces canadiennes de l’Atlantique tenu du 01-02 novembre 2014 à l’université de Moncton (géopolitique et géostratégie des langues), j’ai démontré dans mon argumentaire que « la langue est une arme d’aliénation, d’acculturation et de destruction massive », car celui qui impose à un peuple sa langue, lui impose aussi sa culture et sa vision du monde. Le Cameroun ne pourra se prévaloir de sa souveraineté et de son authenticité que s’il se libère de l’emprise totale du colonisateur dont le moyen de contrôle permanent, de domination constante et d’assimilation pérenne est sa langue.

10/ À qui profite notre assimilation linguistique ?

La souveraineté linguistique du Cameroun est fortement compromise par l’archi-domination de deux langues coloniales érigées en langues officielles.  Ce monopole qui perdure ne laisse aucune chance à la promotion et au développement de nos langues nationales. Il contribue à notre abâtardissement culturel en nous attelant aux basques de nos anciens colonisateurs. Pendant que le gouvernement local est préoccupé dans sa politique par des problèmes essentiels de démocratisation et de lutte contre la pauvreté, les agences françaises et anglo-saxonnes dites de « développement » profitent de cette distraction pour recruter de plus en plus de locuteurs dans la communauté camerounaise en mettant en œuvre par le truchement de la scolarisation (bourses de la francophonie/Commonwealth ) et la médiatisation (TV5/BBC) des moyens colossaux et des mécanismes de promotion alléchants. Lors du dernier sommet de la Francophonie au Congo en 2013, François Hollande a déclaré dans une interview retransmise sur TV5 Monde que « le français est une langue africaine ».  Il n’est donc pas abusif de croire que la disparition programmée des langues vernaculaires locales est un complot d’une certaine mondialisation qui ne profiterait qu’aux empires britanniques et français qui en tireraient un bénéfice conséquent. Ce bénéfice polico-culturel consisterait en la consécration des monstres francophozores et anglophozores, lesquels dévorent par phagocytose des langues tribales essoufflées, asphyxiées et presqu’agonisantes.  C’est donc un truisme d’énoncer que depuis sa vrai fausse indépendance en 1960, le peuple camerounais est paralysé dans son développement culturel par des langues coloniales imposées qui le maintiennent perpétuellement dans un état d’assimilation chronique.

11/ Résultats du sondage

1000 étudiants (250 de Buéa, 250 de Douala, 250 de N’Gaoundéré et 250 Yaoundé) des universités d’état du Cameroun ont participé à ce sondage. La question ouverte qui leur a été posée est la suivante : « parmi tous les idiomes parlés au Cameroun, lequel à votre avis mérite d’être érigé en langue nationale ? Justifiez votre réponse en la soutenant par des arguments précis et concis ». Après dépouillement, les résultats du sondage mentionnent que le CAMFRANGLAIS a été plébiscité à 71% pour les raisons suivantes :

  • Le Camfranglais est comme l’espéranto. Une langue véhiculaire qui n’a pas de locuteurs natifs ou de base d’enracinement ethnique. Aucune communauté ne peut donc en faire sa propriété exclusive. C’est un patrimoine national.
  • Le Camfranglais est une langue en gestation, une langue d’inclusion, une langue ouverte à la créativité néologique de tous ses usagers.  Qu’il soit Bamiléké, Bassa, Ewondo ou Douala, Chaque locuteur peut y déverser ses formules expressives. Et ça marche !
  • Le Camfranglais, comme le drapeau vert-rouge-jaune, est une langue polyhybride dont l’hétérogénéité lexicale et constitutive  concorde avec la diversité ethnique du Cameroun. Il s’agit d’une langue en création qui fonctionne à l’image structurelle de la société camerounaise.

12/ Carte postale du  CAM-FRAN-GLAIS

Le camfranglais est une langue spontanée, un sociolecte hybride né de la combinaison du français (49%) de l’anglais (12%), du pidgin english (6%), des langues vernaculaires (16%) et des emprunts divers (4%). Cette génération spontanée de langue qui serait née après 1972, date de la réunification du Cameroun britannique et du Cameroun français,  est patoisée par 8 millions de locuteurs actifs, de préférence des adolescents et de jeunes adultes masculins de condition sociale défavorisée, habitant un quartier populaire en milieu urbain, au chômage ou exerçant une activité professionnelle dans le secteur informel et ayant une moyenne d’âge inférieure à 40 ans. Cette langue citadine qu’on apprend dans le tas et par immersion à l’académie des trottoirs, des cours de récréation au lycée, des préaux des prisons, des sas des bidonvilles, des bars et discothèques, des marchés populaires, des aires de négoce et de trafics, se décline en trois variétés hiérarchiques : a/ le camfranglais des lettrés, b/ le camfranglais des moyens scolarisés, c/ le camfranglais des peu ou pas scolarisés.Les locuteurs qui s’expriment en camfranglais au Cameroun manifestent par leur choix locutif le désir d’être branché à un certain style, de coder la conversation afin de garantir la confidentialité des messages échangés, d’affirmer leur camerounité en se démarquant du français métropolitain ou en tournant en dérision les langues coloniales imposées. Bien que jeune et embryonnaire, cette « parlure » constitue la seule chance de survie d’un peuple culturellement abâtardi, un peuple dont l’hémorragie linguistique risque de conduire à l’extinction.

13/ La mixité linguistique du Cameroun est-elle un cas unique ? 

Le destin linguistique du Cameroun est loin d’être singulier.Sur des territoires insulaires et dans des états postcoloniaux, partout où il  y a eu cohabitation ou rapport de force entre des langues (langues dominantes/langues minoritaires), partout où les peuples indigènes ou autochtones ont été en contact avec les langues des envahisseurs impérialistes, il s’est produit une génération spontanée de langues mixtes. La meilleure illustration de ce phénomène est aux Antilles avec le créole, en Acadie avec le chiac, dans les colonies britanniques avec le pidgin-English et, spécialement au Cameroun où l’inventivité linguistique est si éloquente que des jeunes ont créé le camfranglais. Ces générations spontanées de langues se sont développées à travers la combinaison de deux substrats linguistiques : les langues coloniales et les langues indigènes ou nationales. Et comme on n’impose pas à un peuple naturel une langue, un mécanisme s’est produit dans l’inconscient collectif sous forme d’une révolution linguistique aux allures nationalistes !!!

14/ Préalables pour la nationalisation du Camfranglais

La nationalisation d’une langue est un acte stratégiquement politique. Généralement, ce processus intervient après la codification. La codification d’une langue est une opération normative qui interpelle à la fois les académiciens et les linguistes. Dans le cas précis d’une langue embryonnaire et non systématique comme le camfranglais, les postulats de codification renvoient aux mécanismes linguistiques de formalisation. Pour que le gouvernement camerounais par décret ou par référendum accorde au Camfranglais le statut de langue nationale, il faudrait en amont que cette langue remplisse les conditions essentielles de standardisation qui permettent à une langue créée de passer de l’informel au formel. Ces postulats ont été développés dans une communication que j’ai présentée au 36ème colloque des linguistes des Provinces de l’Atlantique du Canada du 02-au 03 novembre 2012 à Saint-Mary’s University, Halifax.

15/ Les stratégies de visibilité et de vulgarisation du CAM-FRAN-GLAIS

Au stade actuel de son développement, le camfranglais est une langue véhiculaire orale. En attendant que les linguistes et les académiciens locaux la codifient et la systématisent, les populations du Cameroun, consciemment et inconsciemment, dans un élan spontané, ont dévoilé engagé leur plan de vulgarisation. Ce processus de visibilité est un mouvement ascensionnel de réhabilitation qui comporte six principaux axes stratégiques, six modules :

  • La domestication : Elle consiste en l’apprentissage du camfranglais dans des cellules familiales. Pour que cette initiative soit efficace, il faudrait que les parents ou les locuteurs adultes soient motivés et sensibilisés à cette révolution.
  • L’économisation: Ce protocole consiste à accorder au camfranglais le statut implicite ou explicite de langue de marchandage ou langue de transactions dans le négoce et le petit commerce, surtout dans le secteur informel qui représente 30% de l’économie nationale et qui fournit en lui seul 75% de locuteurs actifs du camfranglais.
  • La médiatisation : elle consiste à organiser des émissions télévisuelles et radiophoniques consacrées aux techniques d’expression écrite et orale en camfranglais. Par exemple, le journal des insolites et des faits divers peut être présenté par des comédiens en camfranglais dans un style ludique. Ces programmes interactifs peuvent aussi être ponctués par des concours populaires qui les rendraient de plus en plus attractifs.
  • La réseautalisation : Cette stratégie consiste à promouvoir la création sur internet des réseaux sociaux et des forums de discussions où interactivement, les camerounais du pays et de la diaspora échangeraient librement leurs souvenirs, leurs expériences, leurs opinions, leurs impressions, leurs préoccupations quotidiennes, en camfranglais.  Mboa cop’s.
  • La musicalisation : Elle consiste à encourager le développement de la musique urbaine en faisant du camfranglais la langue des rappeurs camerounais. Dans d’autres contrées, on aurait préféré le reggae comme musique véhiculaire.
  • La publicitation : Elle consiste à construire les slogans publicitaires pour des produits destinés à la consommation des camerounais en camfranglais afin que le peuple puisse s’identifier au message et agréer le produit. Certains annonceurs locaux s’y sont investis. C’est le cas d’un opérateur de téléphonie mobile dont la campagne publicitaire  dénommée Equation bonheur est  bâtie sous la formule « Pack mboa + offre Toli ». Mboa = pays, terroir. Toli = conversation.

16/ CONCLUSION

Le mouvement identitaire qui éclot au Cameroun sous forme d’une remise en question de l’indépendance nationale et de la revendication de la souveraineté linguistique vise à libérer le Cameroun de la tutelle coloniale et à faire de lui une nation souveraine. La promotion du camfranglais n’implique pas la mort du français ou de l’anglais, au contraire, la dénomination CAM-FRAN-GLAIS cherche à mettre en exergue et à valoriser le triple héritage culturel du camerounais dont le « poly-hybridisme linguistique » est une caractéristique locutoire. En l’absence de toute politique linguistique officielle, l’idéal qui sous-tend le processus de standardisation du camfranglais est la vulgarisation de ce sociolecte à travers tous les circuits informels et les réseaux de diffusion possibles, de telle enseigne que ceux qui prennent des décisions,  les acteurs politiques,  n’aient plus qu’à signer des décrets, après que langue choisie par le peuple camerounais, légitimement, se soit imposée comme devise ou marque d’identité nationale dans la conscience collective. Le combat indiscret que mène prétentieusement le Mouvement Citoyen Camerounais est comparable à celui que mènent les aborigènes en Australie, les cadiens en Amérique, acadiens au Canada et autres peuples colonisés dont la langue minoritaire au contact d’une hyper puissance linguistique et impériale, se sent menacée et menaçant par ce fait l’authenticité de leurs valeurs et de leurs civilisations, car comme le disait Mahatma Gandhi,: « une véritable éducation est impossible si elle passe par une langue étrangère. Seule la langue locale peut stimuler l’originalité de la pensée chez la plupart des gens ». On en déduit donc que sans langue originale, il n’y a point de culture originale.  Ainsi, d’ici quelque décennies, les camerounais parlerons le camfranglais comme langue nationale pour affirmer leur camerounité, comme le déclarait un locuteur zélé interrogé par un média local : « Je speak le camfranglais parce que c’est le topo des vrais mounas du mboa » = « Je parle le camfranglais parce que c’est la langue des vrais fils du terroir ».

NB : Vous avez lu la version « grand public » de cet article. Si vous souhaitez lire sa version « scientifique », contactez son auteur qui vous recommandera une revue spécialisée.

 

Dr. Martin Momha

Université de Moncton

 

 

6 mai 2014

Géopolitique et Géostratégie des langues

 

 Analyse de l’influence des langues dans les systèmes de pensées et la politique des organisations internationales

 

ALPA37a

 

Dr. Martin Momha

Professeur de sociolinguistique et de didactique

Chercheur en sciences du langage et de la communication

 

RÉSUMÉ

Le but de cet article est de définir l’influence de la langue dans les systèmes de pensées et la politique des organisations internationales dans un monde qui se globalise irréversiblement. Notre analyse aborde la problématique sur deux axes dialectiques : l’impérialisme linguistique en amont et la décolonisation linguistique en aval. Dans une approche gravitationnelle et marxiste, notre préoccupation est de savoir d’une part comment certains états devenus des puissances impérialistes parviennent à imposer leur langue sur le plan international et à inféoder d’autres nations à leurs systèmes de pensées  et, d’autre part, comment certaines ex-colonies réunies autour des organisations supra-étatiques agissent stratégiquement pour se défaire de la tutelle linguistique de l’Occident ou pour contrecarrer l’archidomination des langues impérialistes ?

 

MOTS-CLÉS 

Langues, mondialisation, impérialisme linguistique, décolonisation linguistique, géopolitique, géostratégie

 

ABSTRACT

The purpose of this article is to define the influence of language in thinking systems and the policies of international organizations in a globalizing world. Our analysis addresses the issue on two dialectical ways: linguistic imperialism upstream and linguistic decolonization downstream. In a gravitational and marxist approach, our concern is to know how some states become imperialist powers manage to set their languages on the international level and to subordinate other nations to their belief systems and how some former colonies gathered around organizations act strategically to get rid of linguistic tutelage of the West countries or to counteract the domination of imperialist languages.

 

INTRODUCTION

Le village planétaire auquel nous appartenons compte plus 6000 langues répertoriées, inégalement disséminées dans les cinq continents. D’après Ethnologue[1], 33% de ces langues sont en Asie, 30% en Afrique, 19% dans le Pacifique, 15% en Amérique, 03% en Europe.

Ces idiomes en compétition sont des organismes vivants et interactionnels qui entretiennent entre eux des rapports de domination ou de subordination (majo-ritaire/minoritaire), des rapports de prédation ou phagocytaire (coloniale/indigène), des rapports d’égalité (déclaration universelle des droits linguistiques), des rapports de discrimination (officielle/vernaculaire), des rapports de partenariat dans le cadre de la traduction réciproque, des rapports de discrimination (langue officielle/ langue vernaculaire), des rapports d’association (bilinguisme, multilinguisme, etc.) et même des rapports d’indifférence quand il s’agit d’une autarcie fonctionnelle, car chaque langue fonctionne comme un système de signes complet, etc

En dehors des déterminants typologiques[2] et génétiques[3], certains experts[4] classent aussi souvent les langues du monde selon leur coefficient locutif, leur statut officiel, le nombre d’articles sur Wikipédia, le nombre de prix Nobel de littérature, la force d’expansion (l’entropie), le taux de fécondité des locuteurs, Indice du Développement Humain, le taux de pénétration sur internet, le nombre de traduction cible, le nombre de traduction source, l’intention d’apprentissage, etc. Il est important d’insister sur ce dernier paramètre, car il y a cinq siècles, les cinq langues[5] les plus apprises étaient : le grec, Le latin, l’hébreux, le Chaldeén, l’Arabe. Comparativement au siècle contemporain, les 5 langues[6] les plus apprises sont l’anglais, le français, l’espagnol, le mandarin, l’arabe. Une telle évolution nous permet de déduire que le prestige des langues est une question de mode, de génération, de civilisation dominante et surtout d’utilité pratique. Tous ces paramètres énoncés et bien d’autres permettent de mesurer à l’aide d’un système de modélisation de données le poids des langues, leur influence et leur hégémonie dans un contexte international dominé par la géopolitique et la géostratégie.

 

1. DÉFINITION ET MISE EN CONTEXTE DES CONCEPTS

La géopolitique est « l'étude de l'influence des facteurs géographiques, économiques et culturels sur la politique des Etats et sur les relations internationales ». Elle s’intéresse aux problèmes de politique internationale et à ses aspects diplomatiques. On parle d’approche géopolitique lorsqu’il est question de la description des enjeux, de l’analyse des conflits et de « l'étude des interactions entre l'espace géographique et les rivalités de pouvoirs qui en découlent. (…)». Cette analyse repose sur plusieurs axes  parmi lesquels les facteurs décisifs dans les alliances, les aspects militaires et énergétiques, les aspects linguistiques, etc. La géostratégie quant à elle, est « l’étude de fabrication des espaces par la guerre ». Elle sous-entend des trafics d’influence, des conflits d’intérêts, des luttes de positionnement pour le contrôle soit d’une région, soit du monde entier, bref une ambition du leadership sur le plan international.

Transposé sur le domaine linguistique, le jumelage de ces deux concepts fait de la langue l’instrument de la conquête du pouvoir et du positionnement hégémonique des nations dans le monde. La langue est donc une puissance dont se servent certains Etats pour contrôler le monde. En tant qu’instrument de socialisation majeur, elle catalyse des interactions entre des humains et régule leurs activités. Dans la plupart des pays où des groupes ethniques prônent le nationalisme ou la sécession, tout conflit politique implique en arrière-plan un conflit linguistique ou vice-vers-ça, car «les impérialismes linguistiques sont toujours signes d'autres impérialismes et derrière la guerre des langues se profile d’autres  guerres, économiques, culturelles, etc.»[7]. Aujourd’hui nous connaissons les superpuissances militaires, les superpuissances économiques… il y a aussi des hyperpuissances linguistiques. En effet, dans l’histoire contemporaine du monde, on cite généralement deux grandes guerres mondiales. Une troisième se profile à l’horizon : Ce ne sera pas une guerre politique, non plus une guerre économique ou militaire, ça sera une guerre linguistique où les grands empires linguistiques vont chercher à dominer le monde et à imposer à d’autres nations leurs philosophies, car la langue est non seulement un marqueur identitaire, mais aussi un vecteur idéologique.

Claude Hagège (2012) souligne à ce titre qu’ "imposer sa langue, c'est imposer sa pensée"…. Car « seuls les gens mal informés pensent qu'une langue sert seulement à communiquer. Une langue constitue aussi une manière de penser, une façon de voir le monde, une culture »[8]. Ludovic Greiling (2013) ne pense pas autrement lorsqu’il énonce dans son éditorial que « Chaque langue possède ses propres caractéristiques pour penser le monde. Support essentiel des représentations, elle peut devenir sujette à des luttes d'influence. Des tentatives d'acculturation par les empires à la créativité scientifique, les enjeux sont énormes. »[9] Dans un film projeté sur la chaîne de télévision franco-allemande « Arte » le 10.02.2011 à 22 :30, le narrateur du documentaire Jean-Christophe Victor aboutit à la même conclusion : « les langues sont plus qu’un moyen de communication et de relations entre hommes, elles sont un moyen de différenciation et d’affirmation identitaire »[10].Il est donc logique que dans un monde qui se globalise, la tendance à l’unicité de la langue entraîne forcement l’unidimensionnalité ou l’unipolarité de la pensée. Et dans cette verticalisation des relations internationales, dans cette bataille pour le contrôle universel de la pensée et des représentations, les vaincus parleront les langues des vainqueurs.

 

2. HYPOTHÈSES ET CADRE THÉORIQUE

Si par hypothèse d’école nous considérons la mondialisation comme un complot uniformisateur qui ne profite qu’à la civilisation dominante en maintenant des autres peuples dans un état d’acculturation chronique, si la langue est une arme de domination et d’assimilation massive, la problématique qui sous-tend cette analyse vise à savoir : en amont comment certains états devenus des puissances impérialistes parviennent à imposer leur langue sur le plan international et à inféoder d’autres nations à leurs systèmes de pensées ? En aval, comment certaines ex-colonies réunies autour des organisations supra-étatiques agissent stratégiquement pour se défaire de la tutelle linguistique de l’Occident ou pour contrecarrer l’archi-domination des langues impérialistes ? Le cadre théorique et conceptuel de notre approche  se fonde d’une part  sur la théorie gravitationnelle de Louis-Jean Calvet, laquelle illustre dans une sphère globalisée la hiérarchisation et la stratification des langues,  et d’autre part sur la doctrine marxiste en tant que lutte des classes, mieux, « guerre des langues », car il s’agit bien d’un conflit linguistique.

 

3. APPROCHE MARXISTE DE LA THÉORIE GRAVITATIONNELLE DE CALVET

Selon J.-L Calvet, le système linguistique universel représenté par une figure gravitationnelle ressemble à un atome dont l’anglais est l’hyperlangue, c’est-à-dire  la langue nucléaire ou matricielle et les autres langues qui gravitent autour de l’hyperlangue comme des électrons sont des langues périphériques de moyenne ou de faible amplitude. L’anglais serait donc une sorte de protolangue de laquelle dériveraient toutes les autres langues du monde. S’il est vrai que la langue est le reflet d’une civilisation, nous aurons alors une civilisation centrale dite anglo-américaine et d’autres civilisations secondaires.

Cette conception newtonienne des relations inter-linguistiques confère à l’anglais un statut  substratique qui fait d’elle une langue souche, une langue nucléaire qui évolue au sein d’une galaxie translinguistique ou d’un écosystème mondialisé de langues dont la superstructure est animée par un flux centripète.  C’est-à-dire toutes les langues du monde convergent vers l’anglais qui en devient le dénominateur commun. Le schéma suivant illustre bien cette focalisation :

Une approche marxiste de la théorie gravitationnelle de J.L. Calvet corrobore la centralisation vectorielle de l’anglais et la verticalité des statuts linguistiques. Elle instaure entre les langues et les peuples qui les parlent  un rapport hiérarchique et conflictuel de type dominant/dominé ou un ordre de préséance qui porte atteinte au principe d’équité et d’égalité qui régit les langues et les cultures du monde, selon la déclaration universelle des droits linguistiques de Barcelone de 1996.

 

4. IMPACT DE L’ANGLOPHONISATION DU MONDE SUR L’ÉCOLOGIE DES LANGUES

Sur le plan géopolitique, le conflit des langues vise à reconfigurer les nouvelles frontières linguistiques du monde. Ces nouvelles frontières ne sont plus des entités territoriales circonscrites dans un espace géographique délimité ; elles concernent plutôt la force d’expansion des langues et leur influence hégémonique. Il va sans dire, notre planète compte environ sept milliards d’habitants et environ sept mille langues dont certaines ont disparu sans avoir été répertoriées. Il se trouve par ailleurs que 90% de la population mondiale parle 2,5% des langues du monde dont la plus dominante est l’anglais. Cette domination excessive compromet gravement la biodiversité des langues et l’écologie des cultures. C’est sans doute pourquoi contre le risque inéluctable d’une anglophonisation du monde,  le linguiste français Claude Hagège (2012) part en guerre « contre ceux qui prétendent faire de l'anglais une langue universelle, car cette domination risque d'entraîner la disparition d'autres idiomes. Je combattrais avec autant d’énergie le japonais, le chinois ou encore le français, affirme-t-il, s'ils avaient la même ambition. Il se trouve que c'est aujourd'hui l'anglais qui menace les autres, puisque jamais, dans l'Histoire, une langue n'a été en usage dans une telle proportion sur les cinq continents »[11]

Mais le totalitarisme de la langue anglaise n’est pas une suprématie naturelle ou une archidomination démocratique. C’est la résultante d’une stratégie politique conçue par les puissances anglo-américaines et relayée par leurs services diplomatiques à travers des programmes culturels hyper subventionnés à l’étranger. C’est aussi le résultat d’un pragmatisme fonctionnel  grâce auquel l’anglais s’est incarné au sein des organisations internationales comme langue de référence,  langue fondamentale, langue véhiculaire principale, langue obligatoire, puisque les informations, les appels d’offres et les annonces de recrutement dans les organismes onusiens sont publiés exclusivement dans cette langue, ceci en violation du principe de non-discrimination linguistique qui sous-tend la charte des Nations Unies.

Cette politique d’assimilation totalitariste sous-tendue par une dictature de la représentation se fonde sur l’idéologie selon laquelle celui qui impose sa langue, impose sa culture, et celui qui impose sa culture, impose son style et sa vision du monde. La théorie de l’impérialisme linguistique débouche dès lors sur une théorie de l’hégémonisme culturel, processus que décrie Robert Philipson (1992) lorsqu’il cite un « rapport confidentiel »[12] de la conférence anglo-américaine sur l'enseignement de l'anglais à l'étranger :

« L’anglais doit devenir la langue dominante remplaçant les autres langues et leurs visions du monde : chronologiquement, la langue maternelle sera étudiée la première, mais l’anglais est la langue qui par la vertu de son emploi et de ses fonctions deviendra la langue fondamentale ».

Il ressort de cette note confidentielle que la suprématie de l’anglais sur les autres langues « exotiques » est un complot de la colonisation, une stratégie de domination basée sur un asservissement par la langue. Un cannibalisme linguistico-culturel que dénonce J.-L. Calvet avec un certain cynisme :

«La linguistique a été, jusqu'à l'aube de notre siècle, une manière de nier la langue des autres peuples, cette négation, avec d'autres, constituant le fondement idéologique de notre 'supériorité', de la 'supériorité' de l'Occident chrétien sur les peuples exotiques que nous allions asservir joyeusement [13]».

 

5. LES STRATÉGIES DE DOMINATION DES LANGUES IMPÉRIALISTES

L’anglais n’est pas la seule langue prédatrice dans la jungle de la mondialisation. Elle se dispute souvent le territoire et le leadership avec d’autres langues cannibales qu’on classe aujourd’hui dans le paradigme des « puissances linguistiques » qui hier, n’étaient autres que des « puissances coloniales et impérialistes ». Pour maintenir et imposer leurs langues sur le plan international, les anciens colonisateurs ont trouvé une astuce efficiente : créer des confédérations ou des organisations linguistiques qui rassembleraient les anciennes colonies devenues indépendantes politiquement, mais qui partagent encore la langue du colonisateur. Parmi ces organisations en vue, on peut citer L’Association internationale de francophonie, Le Commonwealth, La ligue arabe, La communauté des pays de langue espagnole, etc. L’idéal qui sous-tend ces organisations est qu’ autour de l’enjeu linguistique, on va développer d’autres réseaux et d’autres politiques de coopération  dans le domaine militaire, sanitaire, universitaire, économique, sportif, social, etc.

Prenons par exemple l’Organisation Internationale de la Francophonie qui regroupe 56 pays parlant entièrement ou partiellement le français. Cette organisation, dans son plan stratégique,  a nommé des représentants permanents auprès de l’ONU, de l’Union Africaine et de l’Union Européenne. Ces représentants permanents ont pour rôle d’ « assurer effectivement la présence de la langue française sur la scène internationale ». Le plan de relance pour la présence du français dans les organisations internationales adopté lors du Sommet de Hanoï en 1997 est un des programmes prioritaires de la coopération multilatérale francophone dont les objectifs sont les suivants :

  • placer à des postes jugés stratégiques pour la Francophonie une vingtaine de jeunes experts francophones dans les organisations internationales ;
  • assurer la formation de jeunes cadres issus de pays francophones à la fonction publique internationale ;
  • contribuer, par le fonds d'aide pour la traduction et l'interprétation, à la présence du français dans les réunions internationales qui se tiennent hors de France ;
  • prendre en charge des délégués francophones lors de rencontres internationales de haut niveau.

Toutes ces mesures démontrent comment la France entend imposer et perpétuer son influence, son hégémonie et sa présence dans le monde à travers la promotion de sa langue. Et pendant que la France  met sur pied des stratégies institutionnelles pour maintenir le français sur le plan international, les ex-colonies en Afrique réunies au sein de l’Union Africaine, réfléchissent de leur côté sur la nécessité de promouvoir et de sublimer de patrimoine linguistique africain. Cette révolution en cours s’appelle la « décolonisation linguistique ».

 

6. LES STRATÉGIES DE DÉCOLONISATION LINGUISTIQUE

La « décolonisation linguistique » est un mécanisme d’exercice de souveraineté qui permet à une ex-colonie ayant acquis son indépendance de se libérer de la tutelle linguistique du colonisateur en se dotant d’une langue nationale qui soit singulièrement le reflet de son identité culturelle ou le creuset de son authenticité, car il n’y a pas de culture authentique sans langue originale.

Dans l’introduction de son Mémoire intitulé La décolonisation linguistique et la problématique de la traduction postcoloniale, Robert Gudde (2009) se pose deux questions fondamentales : « Est-il possible qu´une langue donnée soit capable d´exprimer parfaitement une culture étrangère ? Cette langue peut-elle traduire l´imagination issue d´une culture étrangère d´une manière satisfaisante? ». L’ironie et la dérision sont d’autant plus fortes lorsque les chef-d’ Etats africains se rencontrent lors des sommets de l’Union Africaine. Quelle langue parlent-ils ? Si la langue est le reflet de la pensée, de la culture et de la civilisation d’un peuple, comment peut-on exprimer une idéologie panafricaniste dans une langue occidentale ? Cette préoccupation  essentielle a amené l’Union Africaine (U.A.) à créer en 2006 l’Académie des Langues Africaines (ACALAN) dont la mission principale est de « contribuer au développement et à l’intégration de l’Afrique par la promotion et la valorisation des langues africaines dans tous les domaines de la vie publique »[14].

Plus qu’un problème de communication et d’interaction, la question linguistique est désormais un instrument politique, un moyen par lequel l’Afrique entend réhabiliter son patrimoine culturel en se libérant progressivement et méthodiquement de l’assimilation coloniale. Cette philosophie de négation et d’affirmation transparait dans cet extrait du discours de l’ex-président malien Alpha Oumar Konare, prononcé  le 08 septembre 2001 à l’occasion du lancement des activités de l’Académie : « Il est grand temps que notre continent se donne les moyens de faire des langues africaines des langues de travail dans tous les domaines de la vie publique. C’est à ce prix que nous ferons de nos Communautés Economiques Régionales de véritables instruments d’intégration africaine et de l’Union Africaine une réalité vécue par des peuples réhabilités et rétablis dans leur identité et dans la continuité historico-culturelle de leurs espaces.

 Parmi ses programmes prioritaires, L’ACALAN dont le siège est à Bamako au Mali, œuvre sur la promotion et la valorisation les langues africaines en général et des langues transfrontalières véhiculaires en particulier, en partenariat avec les langues héritées de la colonisation. L’idéal qui sous-tend ses travaux est de proposer plus tard à la Communauté des Etats de l’Afrique une ou plusieurs langues susceptibles d’être érigées en langue officielles de l’Union Africaine. Dans une étude à paraître (Momha, 2014), nous avons proposé en tenant compte du principe de laïcité et de la configuration des familles linguistiques africaines cinq langues sous régionales :

  • Le berbère (Afrique du Nord)[15]
  • Le beti (Afrique centrale)[16]
  • Swahili (Afrique de l’Est)[17]
  • Le Haoussa (Afrique de l’Ouest)[18]
  • Le zoulou (Afrique Australe)[19].

Ces cinq langues transfrontalières véhiculaires qui sont potentiellement les langues officielles de l’Union Africaine « renforceront les relations d’échanges entre les populations, et, au-delà des frontières politiques, fonctionneront comme les lignes de suture du tissu socio-culturel de tout un continent en quête d’unité »[20].

Ainsi, l’Union Africaine qui ne pèse aujourd’hui que 02% dans le commerce international mais dont le taux de fécondité est de 6 enfants par famille, pourrait devenir avec son milliard de locuteurs à l’horizon 2035 la deuxième puissance linguistique émergente après la Chine. Une telle conjoncture risque  non seulement de faire basculer les rapports de forces dans la mondialisation, mais aussi de réduire considérablement l’influence du Français et l’hégémonie de l’Anglais dont le continent africain en est encore la principale pépinière de locuteurs. François Hollande, Président de la République française, ne déclarait-il pas à l’orée du dernier sommet de la Francophonie au Congo en 2012 que « le français est une langue africaine » ? Assertion politiquement correcte certes, mais vilipendée par des intellectuels locaux qui lui ont répondu sèchement que jamais dans l’histoire de l’humanité, le gaulois n’a été un ancêtre bantou.

 

CONCLUSION

La conjoncture mondiale actuelle présente des indices géopolitiques et géostratégiques qui nous amènent à croire que nous sommes à l’aube  d’une troisième guerre mondiale. Il ne faut point être visionnaire pour prédire que d’ici quelques décennies, le monde va vivre de grands bouleversements qui risquent de changer radicalement son horloge ou son système d’aimantation. Les grands empires linguistiques qui aujourd’hui ont le vent en poupe, vont chercher à  asseoir leur hégémonie et à consolider davantage leurs positions stratégiques, et les pays émergents dont le patrimoine linguistique est en phase de standardisation, vont chercher à faire bloc autour des organisations intracontinentales et à adopter une politique linguistique commune pour concurrencer l’impérialisme des langues coloniales. Compte tenu de cette dynamique, il nous vient à l’esprit une question qui nous interpelle tous : que deviendront l’anglais, le français, l’espagnol, le portugais, etc. si demain ou après-demain, les ex-colonies qui continuent encore à se servir de ces langues empruntées par procuration décident de résilier le bail linguistique et de sublimer leurs propres langues endogènes ?

 

BIBLIOGRAPHIE

ACADÉMIE DES LANGUES AFRICAINES (ACALAN) :  http://www.acalan.org

BRITISH COUNCIL,  « Anglo-American Conference on English Teaching Abroad », Cambridge, 26-30 juin 1961.

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CALVET L.-J, Le poids des langues et « prospectives », Synergies brésil, N° spécial 1, 2010, p.41-58.

CALVET L.-J., Linguistique et colonialisme, Paris, Payot, 2002

CALVET, L.-J.. – Pour une écologie des langues du monde. Paris, Plon, 1999.

DEFAY A, La Géopolitique, Paris, PUF, coll. «Que sais-je ?», 2005.

ETHNOLOGUE », Languages of the world, http://www.ethnologue.com

FELTIN-PALAS M,  L’Express, 28/03/2013, http://www.lexpress.fr/culture/livre/claude-hagege-imposer-sa-langue-c-est-imposer-sa-pensee_1098440.html

GREILING L. « La guerre des langues », Politique Magazine, 7 janvier 2013, http://politiquemagazine.fr/la_guerre_des_langues.html

GUDDE, A, La décolonisation linguistique et la problématique de la traduction postcoloniale chez Assia Djebar et Malika Mokeddem, Mémoire de Maîtrise, Universiteit Utrecht, 2009.

MOMHA M., « Les langues du monde », Cours, Ling3824, Université de Moncton

OUMAR KONARE A., Discours inaugural de l’ALACAN, Bamako, 08 septembre 2011.

RABELAIS, Pantagruel «Lettre de Gargantua à son fils Pantagruel», 1532.

VICTOR J.-V, Géopolitique des langues, diffusion sur Arte 10.02.2001 à 22h30.

 

 

 



[1] « Ethnologue », Languages of the world, http://www.ethnologue.com

[2] Le classement  typologique consiste  au regroupement des langues en fonction des critères grammaticaux et linguistiques ou en  catégories structurelles (flexionnelles, agglutinantes, isolantes, etc.)

[3] Le classement génétique des langues consiste au rapprochement des idiomes selon leur parenté ou leur degré de filiation.

[4]  L.-J Calvet, Le poids des langues et « prospectives », Synergies brésil, N° spécial 1, 2010, p.41-58.

[5] «Très cher fils…J'entends et veux que tu apprennes les langues parfaitement. Premièrement la grecque comme le veut Quintilien, secondement, la latine, et puis l'hébraïque pour les saintes lettres, et la chaldaïque et arabique pareillement; et que tu formes ton style quant à la grecque, à l'imitation de Platon, quant à la latine, à Cicéron. Qu'il n'y ait histoire que tu ne tiennes en mémoire présente, à quoi t'aidera la cosmographie de ceux qui en ont écrit». François RABELAIS, Pantagruel, 1532.

[6] Ce classement est le résultat d’un sondage que nous avons réalisé au sein de notre cours à l’université de Moncton, Ling3824, « Les Langues du monde », sur un échantillonnage de 234 étudiants.

[7] L.-J. Calvet, La guerre des langues et les politiques linguistiques, Hachette, 1999, p.279.

[8] Michel Feltin-Palas, L’Express, 28/03/2013, http://www.lexpress.fr/culture/livre/claude-hagege-imposer-sa-langue-c-est-imposer-sa-pensee_1098440.html

[9] Ludovig Greiling, « La guerre des langues », Politique Magazine, 7 janvier 2013, http://politiquemagazine.fr/la_guerre_des_langues.html

[10] Jean-Christophe Victor, Géopolitique des langues, diffusion sur Arte 10.02.2001 à 22h30.

[11] Michel Feltin-Palas, L’Express, 28/03/2013, http://www.lexpress.fr/culture/livre/claude-hagege-imposer-sa-langue-c-est-imposer-sa-pensee_1098440.html

[12] « Anglo-American Conference on English Teaching Abroad », Conférence organisée par le British Council, Cambridge,  du 26 au 30 juin 1961

[13] J.-M. Calvet, Linguistique et colonialisme, Payot, 2002, p.21.

[14] Pour les objectifs de l’Académie des Langues Africaines, voir http://www.acalan.org/fr

[15] Le berbère est une langue qui est parlée au Maroc et plus précisément dans le moyen atlas, en Algérie du nord dans la région de Kabyles, en Tunisie, en Lybie et chez les Touaregs du Sahara et en Mauritanie.

[16] Le beti est un continuum linguistique de langues bantoues parlées dans la partie sud du Cameroun, au Congo-Brazzaville, au Gabon, en Guinée équatoriale et à Sao Tomé-et-Principe. Les langues beti sont : bebele, bebil, bulu, eton, ewondo, fang, mengisa

[17] Le swahili est une langue véhiculaire africaine principalement parlée  en Ouganda, au Kenya, en Tanzanie, à l'île de Zanzibar et aux Comores, sans oublier le Rwanda et le Burundi ,le Congo,  la Somalie, la Zambie et l'Afrique du Sud. 

[18] Le haoussa est une langue tchadique principalement parlée au Nigeria, au Niger,  au Ghana, en Côte d’ Ivoire, au Cameroun, au Tchad et au Soudan, Il est aussi parlé dans de nombreuses grandes villes commerciales (Dakar, Abidjan, Lomé, Cotonou, Ouagadougou, Bamako, Conakry, Bangui, etc.). Aujourd’hui, le haoussa est considéré comme une langue véhiculaire (commerciale) d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.

 [18] Le Zoulou est ka langue la plus parlée en Afrique du Sud et dans toute la cuvette de l’Afrique australe

 

 

 

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